130 livres

130 livres

Littérature, boxe anglaise et parfois les deux à la fois

Antoine Faure

Des chroniques de livres nouveaux ou anciens, essentiellement en littérature française ou américaine, et des émissions sur l'actualité et l'Histoire de la boxe anglaise. NB : les sujets sur la boxe sont regroupés en Saison 1, les sujets "Divers" en Saison 2. Textes disponibles sur www.130livres.com

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Et quelquefois j'ai comme une grande idée, Ken Kesey

Si l’essentiel des 894 pages d’Et quelquefois j’ai comme une grande idée consiste en une immersion dans la psyché des Stamper, famille de bûcherons établie à Wakonda (Oregon), le lecteur en apprendra presque autant sur le clan en se tenant aux seules descriptions de la demeure familiale. Depuis longtemps, les habitants des environs ont pris soin d’éloigner leur logis des bras de la rivière éponyme, dont l’inexorable érosion des berges conduit fatalement à la voir emporter toute construction à sa portée. Mais ce serait mal connaître ces têtes de pioches de Stamper que de les croire intimidés par un stupide cours d’eau.

Aussi s’emploient-ils quotidiennement à renforcer le fatras de poutres, câbles, cailloux et traverses sur lequel repose leur grande baraque de bois, remplie jusqu’à la gueule d’un fameux bric-à-brac. Depuis que l’ancêtre Jonas a quitté le Kansas pour l’Oregon, cèdant une dernière fois à l’appel du grand Ouest avant d’en repartir vaincu par la nature hostile, ses descendants ont décidé qu’ils ne cèderaient jamais plus le moindre pouce de terrain aux hommes ou aux rivières.

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Roland Garros 2019 : Nadal – Federer ou la saveur de l’inéluctable

On est en juin 2005, et le Tour de France s’apprête à vivre une dernière édition sous la chappe de malhonnêteté clinique imposée par Lance Armstrong. L’Olympique Lyonnais a dominé la Ligue 1 une quatrième année de rang. Le monde n’a pas perdu une miette de l’agonie de Jean-Paul II. Nicolas Sarkozy va faire du Ministère de l’Intérieur son tremplin vers l’Elysée, alors que s’étire l’inutile fin de règne de Jacques Chirac. Des légions de fans fébriles attendent le pénultième tome des aventures d’Harry Potter. Et le nouveau roi du tennis va réclamer son dû...

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Le point de vue du lecteur : faut-il brûler la saison 8 de Game of Thrones ?

George RR Martin l’avait promis à ses fans depuis bien longtemps : la fin de sa saga A song of Ice and Fire, entamée en 1996 puis adaptée à l’écran sous le titre de Game of Thrones, serait « douce-amère ». Le barbu de Santa Fe à l’inamovible casquette de marin n’est certes pas connu pour son goût de la félicité pure et parfaite. On sait qu’il révéla la conclusion de son magnum opus inachevé aux producteurs David Weiss et David Benioff, lesquels, dès la saison 3 de la série, interpelèrent le spectateur par la voix de l’ignoble Ramsay Bolton : « Si tu penses qu’il y a un happy end à tout ça, c’est que tu n’as pas fait attention. » En bref : on savait que ça piquerait. Voire, on avait signé pour : survenue dès le neuvième épisode, c’est bien la plus fameuse décollation de l’Histoire de la télévision, pour choquante qu’elle fût, qui fit de Game of Thrones un phénomène planétaire.

Tout amateur d’asperges en conviendra : il est des amers succulents. Encore faut-il une préparation à la hauteur. Or, depuis le début de la saison 8, de nombreux fans et critiques se plaignent, au point d’en réclamer la réécriture via une très commentée pétition en ligne. Les griefs portent-ils sur les événements eux-mêmes, la cohérence du scénario qui les enchaîne, ou la qualité d’ensemble des six épisodes ? Et surtout : faut-il vraiment brûler cette saison 8 ?

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White, Bret Easton Ellis

Quiconque se remémore la scène du rat d’American Psycho peut concevoir que son auteur Bret Easton Ellis entretienne un rapport délicat avec le politiquement correct. Avec un roman publié tous les 7 à 8 ans depuis Moins que zéro, l’homme est tout sauf un graphomane. Qu’il ait expressément repris la plume pour fustiger l’état actuel du débat public outre-Atlantique, usant cette fois de la « non-fiction », dit son immense exaspération du moment. L’auteur s’affirme libéral au sens américain du terme, sans pour autant avoir voté à la dernière élection présidentielle, mais c’est à l’encontre des progressistes revendiqués que se concentre l’essentiel de ses griefs. Presque trois décennies après la charge atrabilaire de Philippe Muray contre la bien-pensance triomphante des années Mitterrand, le White de Bret Easton Ellis sonne comme une transposition de L’empire du bien à l’Amérique côtière au temps de Twitter, de l’administration Trump, et de l’adaptation d’American Psycho en comédie musicale (!).

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État de nature, Jean-Baptiste de Froment

La jacquerie est à la mode. Avant même qu’elle ne fasse l’objet du plus long feuilleton hebdomadaire de notre Histoire politique, elle apparaissait dans plusieurs romans parus en ce début d’année, donc terminés plus tôt que l’acte I des Gilets Jaunes. On se rappelle bien sûr les éleveurs laitiers de Normandie poussés à l’irréparable par les quotas européens de Sérotonine. Il faut y ajouter le bon peuple de la Douvre évoqué dans État de nature. Jean-Pierre Barte, fondateur et dirigeant de « JPB Consulting », expert ès communication politique et néologismes de circonstance, est l’un des protagonistes de ce premier roman signé Jean-Baptiste de Froment. Le bougre aurait sans doute qualifié cette récente profusion de soulèvements paysans dans la fiction française de signal faible.