130 livres

130 livres

Littérature, boxe anglaise et parfois les deux à la fois

Antoine Faure

Des chroniques de livres nouveaux ou anciens, essentiellement en littérature française ou américaine, et des émissions sur l'actualité et l'Histoire de la boxe anglaise. NB : les sujets sur la boxe sont regroupés en Saison 1, les sujets "Divers" en Saison 2. Textes disponibles sur www.130livres.com

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L'âme de Napoléon, Léon Bloy

Au moins le bicentenaire de la mort de Napoléon m’aura-t-il donné l’occasion de lire une première oeuvre de Léon Bloy, après l’avoir longtemps connu de réputation et redouté que la rencontre devienne de plus en plus risquée : avec l’âge me vient le goût d’une certaine modération, dont on ne saurait dire qu’elle caractérisât jamais le polémiste et romancier originaire de Périgueux. Face au risque bien réel de ne pas vibrer à l’unisson de l’éloge mystique qu’est L’âme de Napoléon, je me convainquis que la plume « bloyenne » – adjectif non valable au scrabble mais utilisé par ses connaisseurs -, flamboyante et acérée, pourrait à elle seule me convaincre de poursuivre ma découverte de l’auteur du Désespéré. À supposer, naturellement, d’éviter en chemin l’une de ces difficultés d’interprétation de son oeuvre qui donnent toujours matière à controverse au XXIe siècle. Je dois à ce titre saluer l’éclairage qu’apporte ici le dense avant-propos de François Angelier intitulé La Face de Dieu dans les ténèbres. Il resitue L’âme de Napoléon dans la très abondante littérature se rapportant à l’Empereur, remarquable par son universalité, du pamphlet à l’hagiographie. De toute évidence, Léon Bloy a beaucoup lu sur le sujet et son oeuvre en fut imprégnée depuis ses débuts.

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The Dirt, Mötley Crüe

L’amateur éclairé lit des biographies de rock stars pour un shoot prolongé de sex, drugs & rock n’roll, dont il retient essentiellement les deux premiers aspects. Saluons donc le pragmatisme du quatuor angeleno de Mötley Crüe, accompagnés du prête-plume Neil Strauss, à l’heure de façonner le récit monumental de leurs 20 premières années de carrière : il est fort peu question de musique dans les 583 pages de The Dirt, référence incontestée du genre qui aurait aussi pu s’intituler Outrances et conséquences. Réglons ainsi d’emblée la question musicale avant de se frotter à tout ce qui suinte ou qui croustille : on doit à Mötley Crüe l’explosion du glam metal au début des années 80. Au glam rock de la décennie précédente, le courant emprunta maquillage, laque à cheveux, décadence du propos et refrains catchy d’inspiration pop ; au heavy metal, le son lourd et les amplis poussés à 11...

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Vente à la criée du lot 49, Thomas Pynchon

À supposer qu’il passe au travers d’un roman culte, le lecteur chevronné devra assumer d’être insincère – s’il prétend le contraire avec aplomb, ce qui arrive parfois, admettons-le – ou de passer pour un benêt bas du front – au cas où il ose affirmer « bah là j’ai pas compris ». Vente à la criée du lot 49 m’aura au moins épargné ce dilemme, tant son auteur semble peu se soucier qu’une histoire à ce point extravagante puisse être tout à fait comprise. Par comprendre, le Larousse entend « Saisir par l’esprit, l’intelligence ou le raisonnement quelque chose, le sens des paroles, des actes de quelqu’un ». La pleine compréhension d’un collage aussi baroque d’éléments signifiants que le deuxième roman de Thomas Pynchon relève de l’absolue gageure, à plus forte raison pour qui n’a pas la pleine maîtrise du contexte historique et culturel de la Californie des années 60...

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Le désir de guerre, Frédéric Roux

À une jambe près, le grand-père de Frédéric Roux rentrait de la Grande Guerre égal à lui-même, Béarnais taiseux, maladroit et respectueux à l’extrême de l’autorité de sa femme comme de celle de l’État. Le souvenir lointain mais lancinant de ce héros ordinaire à l’humeur si peu altérée par son amputation conduisit l’auteur, à la fin du siècle dernier, à revisiter une mémoire « faite pour inventer le passé », donc trompeuse par essence. Surtout lorsqu’il s’agit de celle d’un pays entier...

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Rock en vrac, Michel Embareck

En ces temps détraqués où l’on annonce la résurrection de Best en « magazine lifestyle » (…), rien ne vaut un morceau d’Histoire encore fumant malgré les décennies, un témoignage allègre et vrombissant du genre à remettre illico le disquaire au milieu du village. Bref, pour savoir (ou se remémorer) ce qu’était VRAIMENT Best, rival trop tôt disparu de Rock & Folk, il faut lire Rock en vrac. Épuisé mais trouvable via l’entremise maléfique de Jeff Bezos (béni soit-il), cet opus inclassable de Michel Embareck revient sur ses dix ans de reportages dans le monde merveilleux de la musique du diable, et plus encore : puisque l’acte d’écrire intéressait le monsieur tout autant que les riffs de guitare sur des rythmes binaires – ses fictions en témoignent, comme le savent les 4 à 5 lecteurs réguliers du présent blog -, il élargit le spectre de ses rencontres à des pointures du roman noir d’outre-Atlantique et signa une poignée de nouvelles à teneur garantie en Mi-La-Ré. De quoi faire de Rock en vrac un objet littéraire sans guère d’équivalents dans un genre où le lyrisme canaille se leste vite de mauvaise graisse. Pas de ça ici : des textes, des vrais.