130 livres

130 livres

Littérature, boxe anglaise et parfois les deux à la fois

Antoine Faure

Des chroniques de livres nouveaux ou anciens, essentiellement en littérature française ou américaine, et des émissions sur l'actualité et l'Histoire de la boxe anglaise. NB : les sujets sur la boxe sont regroupés en Saison 1, les sujets "Divers" en Saison 2. Textes disponibles sur www.130livres.com

En cours de lecture

Me voici, Jonathan Safran Foer

« Ce n’est pas ce dont il parle qui rend un livre juif – c’est que le livre est incapable de la fermer » a dit Philip Roth. Si c’est bien le cas, Me voici, de Jonathan Safran Foer, est indéniablement un roman juif, dont l’auteur s’impose comme l’un des plus dignes successeurs de celui de Portnoy et son complexe au firmament de la littérature américaine contemporaine.
Les volubiles 571 pages qui composent Me voici narrent sur quatre semaines – hors flashbacks et anticipations – le délitement accéléré du mariage de Julia et Jacob Bloch, jeunes quadragénaires habitant un quartier résidentiel cossu du Washington d’aujourd’hui. Dans le même temps, Sam, l’ainé de leurs trois fils, prépare son imminente bar-mitsvah en commettant un surprenant écart de conduite, alors que l’on attend l’arrivée des cousins israéliens des Bloch pour la célébration, et que le patriarche Isaac, survivant de l’Holocauste et grand-père de Jacob, mesure en solitaire les mérites respectifs d’une entrée longtemps différée en maison de retraite confessionnelle et d’un suicide.

En cours de lecture

Le Royaume, Emmanuel Carrère

Pour celles et ceux qui ne seraient pas familiers du monsieur, Emmanuel Carrère est un écrivain français plusieurs fois adapté au cinéma (La classe de neige, L’adversaire, La moustache), qui s’accommode tant bien que mal d’être le fils d’Hélène Carrère d’Encausse – académicienne et historienne spécialiste de l’ex-URSS – et qui a choisi voici quelques années de parler de lui-même et de son héritage slave au travers de ses récits (Un roman russe, D’autres vies que la mienne, Limonov). Il a aussi beaucoup travaillé comme scénariste (Saison 1 des Revenants, sur Canal +).

Le Royaume n’échappe pas à ses habitudes récentes : en racontant le premier siècle de la religion chrétienne où s’est écrit le Nouveau Testament, il s’interroge sur le mystère de la foi et ce qui a permis de la transmettre d’une poignée de pêcheurs juifs sous-éduqués à environ un terrien sur quatre, et c’est soucieux d’évoquer le témoignage de vrais croyants qu’il finit par relater sa propre période mystique. Elle l’a vu brûler de l’enthousiasme jusqu’au-boutiste du néo-converti avant de revenir progressivement à une posture d’agnostique taraudé par la question.

En cours de lecture

Chanson douce, Leïla Slimani

Il est sans doute assez vain de recommander le seul roman de l’année qui soit assuré de se vendre tout seul, à savoir Chanson douce, de Leïla Slimani, Prix Goncourt 2016 et bientôt disponible au pied de tous les bons sapins. Reste qu’internet se prête bien à tout exercice d’une certaine vacuité, et qu’on parle ici d’un franchement bon bouquin.

En cours de lecture

Le fils, Philipp Meyer

C’est bientôt Noël, et il est sorti en poche : l’occasion idéale d’évoquer Le fils, de Philipp Meyer, improbable homonyme américain de l’animateur de feu « La prochaine fois je vous le chanterai » sur France Inter. Passons.

On peut d’emblée mettre un bémol au stéréotype du « grand roman américain », si prisé des critiques outre-Atlantique et rappelé sur la jaquette de son édition française, au moment de parler de ce bouquin imposant. Car si elles constituent certainement un grand roman, ses 671 pages sont avant tout un concentré d’identité texane, dont le propos est d’en affirmer la singularité au sein de l’Union, tant vis-à-vis du verdoyant et industrieux Nord-Est que de la féodalité figée des Etats du Sud.

En cours de lecture

Derniers souvenirs d'anonymat

C’est arrivé à l’été 2011 au Pays Basque, dans un village de carte postale non loin de la frontière, où l’on mange fort bien.

J’avise depuis mon transat un type boudiné dans son short de bain qui tâte avec circonspection l’eau de la piscine de l’hôtel. Tout à ma joie, j’annonce à ma femme : « J’ai un François Hollande à 16/20 ». Et, comme bien souvent, elle me rétorque distraitement que mon sosie est lamentable en levant à peine le nez de son bouquin.

On ne saurait évidemment en rester là, et je me rapproche du bassin pour affiner mon jugement. Le bonhomme nage une sorte d’étrange crawl canin, gardant la tête dans l’axe et le nez au-dessus de l’eau. Il finit ses longueurs, remonte et passe à la douche à quelques mètres de moi. Stupéfaction : c’est bien Hollande, le vrai.