Pourquoi buvons-nous ? Aussi douloureuse qu'inévitable un lendemain de cuite, la question s'impose plus largement dès que l'on constate combien la pratique s'est répandue dans le temps comme dans l'espace. Sur Terre, rares sont les endroits et les époques où l'être humain jamais ne picola. Il n'a d'ailleurs pas le monopole de l'ivresse : bien des animaux la pratiquent avec modération en consommant des fruits qui fermentent. L'alcool les attire, puis leur donne l'impression d'être affamés, ce qui leur permet de stocker d'autant plus de nutriments dans leur tissu adipeux. L'humanité a beau avoir développé l'enzyme de l'encaissement depuis sa descente des grands arbres, elle reste bien la seule à se coller d'authentiques ramasses avec enthousiasme et régularité. Son goût pour la gnôle fut très tôt déterminant dans l'évolution de son mode de vie : l'analyse des premières villes faisant foi, les historiens donnent à la bière un âge voisin de celui de la sédentarité et son brassage en fut probablement l'une des principales motivations... D'ailleurs, dès les Sumeriens, la bibine est omniprésente, on la boit à la paille dans d'archaïques tavernes et les débuts de l'écriture consistent à en tracer les échanges...