« Ce n’est pas ce dont il parle qui rend un livre juif – c’est que le livre est incapable de la fermer » a dit Philip Roth. Si c’est bien le cas, Me voici, de Jonathan Safran Foer, est indéniablement un roman juif, dont l’auteur s’impose comme l’un des plus dignes successeurs de celui de Portnoy et son complexe au firmament de la littérature américaine contemporaine.
Les volubiles 571 pages qui composent Me voici narrent sur quatre semaines – hors flashbacks et anticipations – le délitement accéléré du mariage de Julia et Jacob Bloch, jeunes quadragénaires habitant un quartier résidentiel cossu du Washington d’aujourd’hui. Dans le même temps, Sam, l’ainé de leurs trois fils, prépare son imminente bar-mitsvah en commettant un surprenant écart de conduite, alors que l’on attend l’arrivée des cousins israéliens des Bloch pour la célébration, et que le patriarche Isaac, survivant de l’Holocauste et grand-père de Jacob, mesure en solitaire les mérites respectifs d’une entrée longtemps différée en maison de retraite confessionnelle et d’un suicide.