Sans doute peut-on voir dans la claustration plus ou moins volontaire d’un ou plusieurs individus dans les habitacles exigus de bolides lancés à 130 à l’heure un concentré de l’expérience du confinement de 2020. Plus largement encore, pour Marcus Malte, la bagnole dit tout de ce que nous sommes devenus. Dans Aires, il fait d’une imposante cohorte d’automobilistes partageant le même tronçon d’autoroute française un véritable objet d’étude anthropologique, conduite par nos lointains descendants. L’intrigant prologue, dans une novlangue criblée de calembours et néologismes, résume le projet : une reconstitution précise qui les aiderait à comprendre notre actuelle civilisation de pollueurs individualistes, aliénés par le travail et le matérialisme, l’esprit accaparé par les misères et les beautés d’un amour encore réputé libre.